dimanche 8 novembre 2015

Article "Une histoire de fou" - par CHRISTOPHE KANTCHEFF



"UNE HISTOIRE DE FOU" - Drame - film de Robert Guédiguian

REMARQUABLE analyse de Christophe Kantcheff  (Politis)
source : "La Gazette - Cinéma Castillet" n° 159

Qu'est-ce que l'Arménie de Robert Guédiguian ? Précisons la question : l'Arménie non pas vue par le cinéaste - ce qui était l'objet d'un précédent film, le Voyage en Arménie (2006). Mais l'Arménie qu'il porte en lui, sa part arménienne intime - celle qui le fait héritier d'un "peuple génocidé", rappelle-t-il toujours, tandis que par sa mère allemande, il est lié à une nation génocidaire. Une histoire de fou apporte une double réponse à cette question. La première tient tout simplement dans l'existence même de ce film : son arménité est source de création. Pendant longtemps, Robert Guédiguian ignorait (ou feignait d'ignorer) celle-ci, qui par conséquent ne transparaissait pas dans son cinéma. Aujourd'hui, c'est le deuxième film qu'il signe en s'appuyant sur cette identité. La seconde réponse porte précisément sur la manière de vivre son arménité, de la revendiquer. Au vu de l'oeuvre du cinéaste, on ne sera pas étonné qu'Une histoire de fou en propose une vision ouverte. Et cette vision ne pouvait pas être plus claire qu'exposée à partir de circonstances critiques (...).
En réalité, c'est ce qui se joue à Marseille, entre la mère d'Aram, Anouch (Ariane Ascaride), et Gilles qui donne à Une histoire de fou une dimension exceptionnelle. Anouch est persuadée qu'elle doit aller vers le jeune homme que son fils a rendu impotent, amer et malheureux de vivre. Mais ce qui est admirable chez cette mère, c'est que son acte, qui n'avait au départ qu'une seule motivation - sauver son fils - va s'élargir. Face à Gilles, Anouch dépasse toutes les logiques d'appartenance première, primaire. La mère, dans le cinéma de Robert Guédiguian, a toujours été une figure essentielle. Mais elle prend ici un tour inédit, renvoyant à la fois à l'image de la mère maternelle, à celle de la "bonne mère", c'est-à-dire une mère qui se partage, et à celle de la mère patrie. Au-delà de son fils et d'elle-même, grâce à l'amour dont elle est capable, Anouch entraîne Gilles hors de son malheur. Elle le fait ainsi cheminer vers la cause arménienne qui lui vaut pourtant d'être handicapé, pour en devenir le "meilleur ambassadeur", comme le lui dira plus tard Aram. Ensemble, Anouch et Gilles sortent d'eux-mêmes, se libèrent de leurs égoïsmes. Voilà l'Arménie que porte Robert Guédiguian : à vocation universelle, elle s'oppose aux communautarismes. Quant au duo que forment Ariane Ascaride et Grégoire Leprince-Ringuet, dont les personnages oscillent entre douleur et complicité, il est absolument déchirant.

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jeudi 15 octobre 2015

"Une histoire de fou" - Robert Guédiguian - A VOIR ABSOLUMENT

Robert Guédiguian - Dzovinar Melkonian


**Berlin 1921, Talaat Pacha, principal responsable du génocide Arménien est exécuté dans la rue par Soghomon Thélirian dont la famille a été entièrement exterminée. Lors de son procès, il témoigne du premier génocide du 20ème siècle tant et si bien que le jury populaire l’acquitte. Soixante ans plus tard, Aram, jeune marseillais d’origine arménienne, fait sauter à Paris la voiture de l’ambassadeur de Turquie. Un jeune cycliste qui passait là par hasard, Gilles Tessier, est gravement blessé. Aram, en fuite, rejoint l’armée de libération de l’Arménie (ASALA) à Beyrouth, foyer de la révolution internationale dans les années 80. Avec ses camarades, jeunes arméniens du monde entier, il pense qu’il faut recourir à la lutte armée pour que le génocide soit reconnu et que la terre de leurs grands-parents leur soit rendue. Gilles, qui a perdu l’usage de ses jambes dans l’attentat, voit sa vie brisée. Il ne savait même pas que l’Arménie existait lorsqu’Anouch, la mère d’Aram, fait irruption dans sa chambre d’hôpital : elle vient demander pardon au nom du peuple arménien et lui avoue que c’est son propre fils qui a posé la bombe. Pendant que Gilles cherche à comprendre à Paris, Anouch devient folle de douleur à Marseille et Aram entre en dissidence à Beyrouth… jusqu’au jour où il accepte de rencontrer sa victime pour en faire son porte parole.

Durée : 02:14
Genre : Comédie dramatique, Drame 
Réalisé par : Robert Guédiguian
Acteurs : Syrus Shahidi, Simon Abkarian, Ariane Ascaride, Grégoire Leprince-Ringuet, Serge Avédikian**

Sollicitée par le cinéma "Castillet" à Perpignan, à la faveur de la projection en avant-première du film de Robert Guédiguian, afin de participer à cette rencontre, la petite Association Arménienne des Deux-Catalognes était là, ainsi que les membres d'une communauté qui s'étoffe au fil des jours.
Le public fidèle des projections à thème que programme régulièrement le cinéma aura pu, du même coup, découvrir cette communauté encore timide dans ses manifestations, ainsi que les saveurs arméniennes d'un "pot convivial" offert par l'association, en clôture des débats qui ont suivi la projection.

Un film dont la construction qui se situe entre faits réels et fiction, conduit le spectateur non initié, à la découverte du génocide sanglant dont le peuple arménien a été victime dans l'empire ottoman, et dont l'apogée se situe au cours de l'année 1915.
 Sans pathos superflu, avec la précision d'orfèvre d'une trame subtile et efficace, le choix d'acteurs talentueux et crédibles, Robert Guédiguian réussit le pari d'interpeller le spectateur sans saturation inutile, avec un film captivant, chargé d'émotion.  
Les débats qui ont suivi ont montré l'intérêt suscité par ce film, qui apparaît en fin de compte, ainsi que le soulignera un spectateur, comme un hymne d'espoir envers l'humanité.

Merci Robert pour ces instants de partage et d'émotion.

  


Merci à nos fourmis talentueuses, Knar Sakalian, Nelli et Hamlet Ghazaryan, Sona Khatchatrian, nouvelle venue dans l'association à qui nous devons aussi l'arrivée de trois autres "fourmis" - qui ont élaboré un buffet de qualité, qui fera date dans les annales des projections à thème du cinéma Castillet, à Perpignan ! Le vin d'Areni, y contribuera aussi !